Les documents d’intentions en prévision d’une modification des programmes et du socle commun pour le français et les mathématiques en maternelle et cycle 2 dès la rentrée 2024 ont été publiés par le Conseil supérieur des programmes (CSP) le 29/02/2024. Ces notes d’intention sont marquées par la volonté de contrôler le travail enseignant en « protocolisant » les programmes. Les évaluations nationales y prennent une place importante, puisqu’elles doivent devenir, au moins en maternelle et au cycle 2, les attendus des nouveaux programmes. Une catégorie précise de la recherche s’impose au détriment de toutes les autres. La rentrée 2025 verra une refonte du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, ainsi que la réécriture des programmes des cycles 3 et 4 en français et mathématiques et celle de 2026 une révision des programmes hors français et maths des cycles 1 à 4, afin de les harmoniser avec le nouveau socle commun.
Suite à la lettre de saisine du Conseil supérieur des programmes (CSP) de Gabriel Attal le 08/01/2024, le CSP a produit une note sur le français et une note sur les mathématiques le 29/02/2024, pour la révision des programmes de maternelle et de cycle 2 pour la rentrée 2024.
Le CSP prend en compte les recommandations et circulaires pédagogiques ainsi que les guides pour l’enseignement des fondamentaux produits par le ministère depuis 2017 pour rédiger les programmes. Rappelons que le guide orange n’est pas fondé sur l’état de la recherche.
Les notes du CSP introduisent une confusion entre Programmes et Modalités de mise en œuvre.
On a là une inversion, le ministère impose l’utilisation de méthodes. Jusque là, les programmes étaient l’objectif commun à toutes et tous et les enseignant·es devaient construire leur mise en œuvre, exerçant leur liberté pédagogique. L’inversion consiste à remplacer l’appui sur la professionnalité enseignante par une protocolisation du métier : il faudrait “appliquer” la feuille de route. Ce changement radical est très grave pour le métier comme pour les apprentissages des élèves.
Les programmes sont définis en fonction des évaluations nationales et non l’inverse.
L’objectif est donc de réduire les programmes aux items des évaluations standardisées. C’est un appauvrissement sans précédent qui se prépare. Réduire les apprentissages aux items des évaluations revient à préparer le tri social des élèves : il y aura ceux dont le “capital culturel” des familles compensera les apprentissages culturels manquants et les autres. Là aussi, c’est une inversion extrêmement grave qui est annoncée.
Le CSP ne prend en compte qu’une partie de la recherche.
Il impose d’une part le courant de recherche de « l’éducation fondée sur les données probantes », porté par le CSEN (Conseil scientifique de l’Education nationale, présidé par Stanislas Dehaene) et d’autre part, en termes de pratiques, « l’enseignement direct » (appelé trompeusement en France « enseignement explicite ») et la RàI (réponse à l’intervention).
Ces modèles d’enseignement n’ont jamais été débattus dans aucune instance. Ils s’appuient sur la conception d’un “élève-type” dont on contrôle la progression prévue par les évaluations standardisées. Le CSP, sur les pas du CSEN, se propose de « protocoliser » au moins pour une part l’enseignement.
Les nouveaux programmes pour la rentrée 2024 devraient être présentés en mai au conseil supérieur de l’éducation.