FSU-SNUipp du Gard
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https://30.snuipp.fr/spip.php?article2472
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Annonces sur la revalorisation salariale enseignante : la méfiance est de rigueur !
dimanche, 8 décembre 2019
/ GM
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Après un courrier - à bien des égards provocateur - de notre ministre le 3 décembre, voici que le 5 le gouvernement annonce une "revalorisation des enseignants", dans un flou qui frise l’indécence : pas de montant budgétaire, pas d’échéancier, pas de concertations avec les syndicats en vue, etc... Si le ridicule ne tue pas, il faut prendre le temps de revenir sur cet effet d’annonce pour le situer dans le contexte.
Tout d’abord, rappelons que le budget 2020 n’a pas prévu d’enveloppe pour la revalorisation : juste l’avancement et un (maigre : 30 M d’€) coup de pouce pour accélérer le passage à la Hors Classe dans le 1er Degré. Trois groupes de travail ont eu lieu au MEN avant le 5 décembre sur la question salariale : rien n’a été mis sur la table, et pour cause. Ensuite, nous avons bien compris le Président qui, à Rodez, a déclaré ne pas avoir les 10 milliards nécessaires à cette revalorisation. 10 Milliards représentent l’économie réalisée par le gel du point d’indice de 2010 à 2015, soit en 5 ans, dans les trois fonctions Publiques. Depuis, au moins 8 autres milliards d’économie ont été réalisés sur le dos des fonctionnaires et, qu’on sache, le dégel du point pour 2020 n’est toujours pas envisagé. E. Macron voit donc fort court : rattraper les pertes en pouvoir d’achat ET ENSUITE revaloriser nécessitent bien plus que 10 malheureux milliards !
A la fin 2019, alors que les prix auront crû de 48 % depuis 1990, le point d’indice n’aura progressé dans le même temps que de 24,2 %. Un décrochage de 23,8 % en somme, expliquant pour partie la grogne enseignante sur les salaires. Enfin, le même gouvernement a repoussé d’un an le protocole signé il y a 4 ans ("PPCR") et que s’appropriait notre Ministre en septembre en annonçant généreusement 300 € de plus par an, dont nous n’avons toujours pas vu la couleur... On est donc en droit de douter fortement des propos d’E. Philippe annonçant une future et réelle revalorisation.
Retour sur la lettre de JM Blanquer et sur le discours d’E. Macron à Rodez. Une drôle de scène a eu lieu en Aveyron : le Président annonce une retraite des enseignants comprise entre 1 000 et 1 200 € ; JP Delevoye lui passe plusieurs cartons pour lui rappeler qu’elles se situent autour de 2 600 €. Le président n’en démord pas, persiste et signe. Et d’embrayer sur la transformation de la carrière, le temps de travail, etc... Un vrai fouillis, en apparence. Dans sa lettre du 3 décembre, JM Blanquer n’a pas omis de rappeler qu’aucune retraite ne passerait sous la barre des 1 000 €. Troublante convergence du discours et du courrier qui rejoint par ailleurs les effrayantes simulations - jusqu’à 900 € de perte pour une carrière complète - que nous pouvons faire. Il s’agit d’une sorte de "déminage du terrain" visant à faire accepter d’emblée un fort coup de rabot dans les pensions.
Plusieurs ministres, depuis le 5, se sont exprimés sur la revalorisation des enseignants. Tous la placent dans la perspective du futur système de retraites à points, ce qui peut signifier que cette revalorisation ne concernerait pas tous les enseignants, mais seulement ceux impactés par cette réforme. Dans le cadre de la nouvelle loi (Darmanin) de la Fonction Publique et en croisant avec les propos de notre ministre, il convient également de s’interroger sur les modalités de cette revalorisation : la méritocratie a déjà fait son entrée dans nos métiers (Hors Classe et Classe Exceptionnelle), penchant accentué par la nouvelle loi. Dès lors, même chez les concernés par la reforme des retraites, le traitement individualisé des rémunérations pourrait conduire à des montants différenciés, voire pas de montant du tout... Parions par ailleurs que cette "revalorisation" ne serait pas indiciaire mais indemnitaire (dans la logique de l’intégration des primes dans le calcul de la retraite) ce qui, si l’indemnité concernait tout le monde, n’aurait aucun impact sur la retraite de ceux qui partiraient avec "l’ancien régime".
Nous devons donc rester extrêmement vigilants sur les propositions gouvernementales à venir et ne pas se laisser avoir par des mesures partielles, ciblées et indemnitaires. Les récentes "réponses" apportées pour les personnels soignants des hôpitaux publics donnent un éclairage édifiant sur les méthodes gouvernementales...
Christian CAM